J'avais déjà parlé d'Andy Clark comme un des auteurs de référence de ce blog (14 novembre). Le philosophe, spécialiste en sciences cognitives, a encore fait parler de lui ces derniers jours. En effet, il a publié le 12 décembre dernier un article sur le tout récent blog de philosophie du New York Times. Quelques jours plus tard, Andy Clark remettait le couvert avec une réponse aux objections soulevées dans les commentaires du premier article.
Le sujet de cette intervention est la théorie de l'Extended Mind (esprit étendu), que Clark avait défendu avec David Chalmers dès 1998. Andy Clark consacre tout un livre à cette question (Supersizing the Mind, 2008) et a paru récemment un ouvrage collectif d'articles discutant l'Extended Mind (Richard Menary, Extended Mind, 2010).
La question que pose Clark est celle-ci : est-il possible que l'activité qui nous permet de penser se déroule en dehors de notre cerveau ?
Cela peut paraître vraiment étrange, mais n'est-il pas vrai que lorsque nos mouvements sont entravés, notre réflexion s'effectue plus difficilement ? N'a-t-on pas aussi besoin du corps pour nous aider à penser ? De la même manière, nombre de personnes qui ont reçu une prothèse pour remplacer un membre semble l'avoir intégré comme une partie non-biologique de leur corps, plutôt que comme un simple outil. Clark émet l'hypothèse que plus la prothèse sera lié au cerveau par une interface non-invasive ou même invasive, plus elle prendra part au processus cognitif de l'individu concerné. Il imagine même que cette prothèse soit en fait un "explant", qui soit relié au cerveau mais pas au corps, par où pourrait avoir lieu une partie du processus cognitif. L'esprit n'est donc pas simplement le résultat de l'activité neuronale, mais est bien plutôt l'agrégat complexe composé des interactions entre le cerveau, le corps et l'environnement.
Cet article a suscité pas moins de 187 commentaires, auxquels Clark a tenté de répondre deux jours plus tard. Il reconnait évidemment une différence entre un cerveau et un smartphone. Si on perd le premier, cela sera plus dommageable que de perdre le second. Mais ce n'est pas pour autant qu'il faut exclure le smartphone des processus cognitifs, de l'esprit. En effet, nous pouvons perdre des neurones, un doigt... sans pour autant avouer par la même occasion qu'ils n'étaient pas inclus dans l'esprit eux aussi, avant de disparaitre. Une autre critique suggèrerait qu'il faudrait différencier ce qui fait le système cognitifs, de ses simples "inputs", mais Clark ne l'accepte pas. Il signale que s'il pense que l'esprit n'est pas tout entier contenu dans le cerveau, il n'en va pas de même pour la conscience.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire